Marennes, Marans et les marais…
En plus du toit, de la table, de la compagnie, de la plage, il y avait une balance à Meschers. Et on en a profité pour peser nos montures et leur attelage. Miha a pesé minutieusement chaque morceau de notre chargement et en est arrivé à la terrible conclusion suivante : plus de 81 kg pour lui avec un jour de nourriture mais sans eau et 99 kg pour moi avec les filles… Je me doutais bien qu’on était lourds mais à ce point… ça me laisse perplexe et ça m’amène à deux réflexions :
- Pas étonnant que j’en bave à la moindre montée…
- C’est quand même incroyable un vélo… pouvoir déplacer tant de poids sur des milliers de kilomètres avec des « si petits » mollets !
Je me dis aussi qu’il faudrait vraiment que les filles aillent plus souvent sur le tandem, d’autant qu’Alma se met parfois à pédaler pour de vrai ! Etonnamment, alors qu’on avait supposé que les filles voudraient rester ensemble, qu’elles seraient dans la charrette à l’heure de la sieste et que Léna irait peu sur le Pino, c’est elle qui préfère y aller et elle y dort peut-être même mieux que dans la charrette puisqu’elle n’a pas la distraction d’avoir Alma à côté d’elle.
On retrouve donc le morceau de Vélodyssée sur lequel Léna avait été initiée au cyclotourisme alors qu’elle avait 8 mois, on reconnait certains endroits, on prend des variantes à d’autres, on en évite d’autres encore, on en découvre encore… Parfois, les pistes cyclables sont splendides, parfois un peu chaotiques mais l’air marin et le soleil sont délicieux… On voit moins de mimosas et ce sont désormais les jonquilles et les magnolias en fleurs qui ornent les jardins, on voit déjà que le printemps approche et que le sud s’éloigne…
A La Palmyre, une allée magnifique longe la mer et la plage, les retraités qui s’reposent sur les bancs publics nous regardent passer cheveux au vent. On se sent libres et ça nous rend heureux…
Face à l’île d’Oléron, on gare nos vélos et on pose notre tente dans les dunes entre coquillages et crottes de lapins. Au dessert, Alma propose de jeter le trognon de sa pomme pour qu’un pommier pousse qui puisse nourrir les lapins de ses pommes.
« – Il aura poussé, demain matin, le pommier ? nous demande-t-elle
– Oh non, il faut beaucoup de temps pour qu’un arbre pousse…
– Mais la nuit, c’est très long… »
Il va falloir réviser un peu la notion de temps !
A Marennes, on gravit le pont et on croit s’envoler tellement le vent est fort ! On arrive au centre du village à l’heure du marché et pile le jour de la fête de la licorne. Une aubaine ! Les commerçants portent tous la corne et les filles reçoivent bonbons, coloriages, apéro et même un bracelet du plus pur mauvais gout… à leur plus grand bonheur… Malgré tout, le village est mignon et on y trouve de quoi faire un bon pique-nique. Le boulanger nous offre même le dessert !
Au milieu des marais, on croise des cigognes, des hérons, tout un tas de canards et de volatiles qu’on ne sait pas identifier mais pas l’ombre d’une voiture et c’est très chouette ! J’apprécie moins quand la route se transforme en chemin. Avec la charrette, je tolère quelques kilomètres caillouteux et puis je râle ! Mal aux épaules d’être crispée sur le guidon, aux mains de freiner si souvent, aux cuisses de pousser si fort sur les pédales, à la tête de devoir calculer le meilleur itinéraire entre les trous… Et en plus, le Transbordeur de Rochefort est en hibernation et il faut donc faire un détour par Tonnay-Charente pour traverser le fleuve. Heureusement, le pont suspendu est magnifique et la vue d’en haut encore plus.
Un peu plus loin, comme nous l’avait conseillé un cycliste qui nous avait accompagné un moment, on prend un chemin qui mène sur les bords de la Charente et on trouve un spot de camping trois étoiles sur la berge au pied des carrelets. Une fois la tente posée, on se rend compte qu’on est à marée basse et que l’eau va monter ! On essaie de réfléchir, d’évaluer, de calculer et puis on opte pour la méthode empirique et on met le réveil au milieu de la nuit pour voir si l’eau nous approche trop dangereusement. Ouf, pas besoin de migrer !
Au matin, le vent souffle fort mais galvanisés par le souvenir des meringues multicolores du pâtissier de sous la grande porte, on fait d’une traite les 40 km qui nous séparent de La Rochelle. Nous nous arrêtons dans la même aire de jeux qu’il y a 2 ans pour pique-niquer et Alma retrouve avec plaisir les structures en forme de bateau. On voit de loin un couple qui observe nos vélos et regarde attentivement la carte sur le fanion puis entre dans le même square et la discussion s’engage. Ils sont partis deux mois avant nous depuis Tanger et ils remontent vers la Norvège avec leurs 3 enfants en suivant plus ou moins la même route que nous. On échange nos premières expériences, nos bons conseils, nos questionnements et surtout nos coordonnées et notre enthousiasme de s’être rencontrés ! Et si on se retrouvait en chemin…?
Nous l’avions déjà été il y a 2 ans et nous sommes à nouveau séduits par La Rochelle. L’atmosphère générale, son port et son eau turquoise, les rues piétonnes, les belles pierres…. et les superbes aménagements cyclables ! Les pistes cyclables sont partout, bien pensées, bien indiquées, on peut attacher son vélo partout, les automobilistes sont respectueux et on croise, malgré la météo capricieuse, des gens de tous âges sur des vélos de tous types… preuve s’il en était besoin, que lorsque les politiques urbaines favorisent le cyclisme, la population se met à pédaler !
On aime donc La Rochelle, et même sous la pluie, puisque les trombes d’eau qui se mettent à tomber nous permettent de nous réfugier dans une patisserie ! Puis on prend la direction de Puilboreau pour aller chez Corinne et Tom, connaissances de connaissance, qui peuvent nous accueillir pour la nuit. Et ici encore, on est superbement reçus. Tellement bien d’ailleurs que quand on voit que la pluie a l’air bien décidée à continuer de tomber, on s’installe pour une nuit de plus et, puisque l’eau a l’air d’être le thème du moment, on va visiter l’aquarium ! Alma est fascinée par les requins et surtout leur nombre de dents. Léna voit des cacas boudins derrière chaque vitre et nous on trouve qu’il est très beau, mais quand même très cher, cet aquarium ! De retour à Puilboreau, on déguise les filles à la hâte pour participer à la toute fin du carnaval et on profite de la compagnie de Corinne et Tom : les filles apprécient surtout les légos et les peluches, et nous encore plus leur conversation, leur curiosité, leur maison pleine de vie et de bonheur…
Le vent a poussé les nuages et on reprend donc la route dimanche matin sous un beau ciel dégagé. Jusqu’au beau village de Marans, on suit un canal moucheté de pêcheurs puis on découvre le marais poitevin. Alma dévore les histoires de sa nouvelle enceinte Merlin, Léna chante « Petit Papa Noyël » à l’avant du Pino, Miha cherche des jeux de mots polyglottes sur poitevin/pot de vin, et moi je me demande s’il y a tant de caravanes parce que le sol est trop humide pour les vraies maisons. On savoure aussi le calme, la douceur du soleil et la beauté du paysage en zigzagant entre les promeneurs du dimanche. Tant de sérénité nous fait oublier les petits tracas de ces jours-ci : Alma qui vomit son petit déjeuner sur ses chaussettes, sa boite à histoires qui rend l’âme, mes lunettes de soleil sur lesquelles je roule, l’arceau de la tente que je me prends violemment dans le nez… Et puis plus le soir approche, plus on se dit que les marais, c’est bien beau, mais c’est marécageux ! On s’en sort finalement pas si mal en posant notre tente sur une aire de camping car mais le taux d’humidité est impressionnant et pas particulièrement agréable avec des températures nocturnes qui descendent encore jusqu’à 2°…
Par chance, le soleil sèche la tente le matin et on finit notre visite de cette « Venise verte » en passant par le village de Coulon, bien joli et complètement mort, à notre plus grand désespoir puisque nous comptions y gouter la spécialité locale : le pâté de ragondin ! On arrive à Niort pour le pique-nique et on trouve la ville belle et agréable, nous qui supposions qu’il n’y avait, ici, que des bureaux d’assureurs et des entrepôts de la Camif désaffectés ! Une passante japono-tobagaise voit nos vélos et engage la conversation, elle est fascinée et exaltée pour le projet, elle veut en parler à son association de vélo. Un peu plus loin, en sortant de la ville, une randonneuse m’aide à pousser mon vélo dans une côte trop abrupte et nous pose tout un tas de questions incrédules. On se réjouit que nos vélos permettent ces rencontres impromptues et si intéressantes…
A partir de Niort, la chemin n’est plus plat du tout et c’est nous qui sommes raplapla ! Les paysages sont très beaux alors on appuie fort sur les pédales sans rechigner et on arrive jusqu’à Champdeniers où la municipalité a eu la brillante idée de laisser un petit terrain à disposition des randonneurs et des cyclistes à l’angle de la rue du paradis et de celle de la folie.
Le matin, le ciel est bien gris mais on continue notre route sous un crachin qui finit par nous mouiller. A midi, on s’arrête à Soutiers, persuadés d’y trouver un abri pour pique-niquer mais on a beau tourner dans la hameau, rien de mieux que l’abri bus ne se présente à nous. Une fenêtre salutaire s’ouvre alors. C’est Valérie, qui travaille seule dans les locaux de la mairie, et qui nous propose de venir nous installer pour le repas devant la radiateur… on n’aurait pas pu rêver mieux ! Valérie est débordante d’attention, de bienveillance et ça l’inquiète beaucoup qu’on ne sache pas où on va passer la nuit. Alors, sans rien nous dire, elle appelle on ne sait qui, qui lui parle d’on ne sait qui d’autre et elle revient peu après avec un papier sur lequel elle a noté le numéro d’une collègue qui nous accueillera exactement dans le village qu’on avait montré un peu au pif sur la carte comme destination !
Nous voilà donc en route pour Saint-Loup-Lamairé où Aymeric et Aurore nous accueillent comme si on s’était toujours connus. Leur maison est grande, il y a de la place pour plus que deux, disent-ils, et c’est chouette de passer une soirée qui change de l’ordinaire. Et pour nous aussi, passer une soirée avec eux, c’est super chouette ! Leur maison sent les plantes aromatiques, le magasin bio et l’énergie de la jeunesse, je crois que j’aurais adoré y vivre dans une autre vie… Ils aiment la nature, la terre, la région et nous proposent tout un programme d’activités locales pour les jours à venir mais le vent nous pousse et on continue notre route jusqu’à Thouars le lendemain.
Comme la météo est toujours incertaine, on pédale le plus possible tant qu’il ne pleut pas et on arrive encore à passer entre les gouttes. Par contre, on n’échappe pas du tout aux montées et aux descentes et au bout de trois jours de montagnes russes, les cuisses commencent à piquer. D’autant que depuis qu’elles ont une nouvelle radio, les filles préfèrent rester dans la charrette malgré mes lourdes incitations à aller sur le tandem.
Les villes ou villages qu’on traverse sont aussi morts que beaux. On se demande pourquoi on connait si peu cette région qu’on trouve pourtant si charmante.
A Thouars, on est hébergé chez Marc, Sophie et leurs enfants qu’on a connus par Facebook. A peine arrivés, les filles filent jouer avec Arthur et Eleanor et on ne les voit plus de la soirée. Ici, il y a des tonnes de jouets, des livres, des poules, des chiens et des copains… le bonheur… Et il y a même un super papa qui sait réparer les boites à histoires, Alma n’en demandait pas tant ! Le matin, elle va en vélo cargo accompagner les enfants à l’école avec Marc. Savoure-t-elle le fait de ne pas y aller, elle…? Il y a surtout une famille simple et agréable qui aime voyager à vélo, partager ses expériences, discuter autour d’un verre et chez qui on passe encore une super soirée. La chambre d’amis leur est réservée quand ils passeront à Nancy 😉
A partir de Thouars, enfin, le relief devient plus propice pour notre équipage et comme en plus on a le vent de dos, on fait les 40 km qui nous séparent de Saumur dans la matinée. Les villages ont chacun leur petit château, les maisons sont de pierre claire et les vignes recouvrent à nouveau les champs : on approche de la Loire.
A Saumur, on retrouve Sylvianne, la mère de Pernelle, qui n’habite pas très loin et vient nous accompagner avec son vélo et son courage pour affronter la pluie aujourd’hui et le vent de face demain. A 5, on sera plus fort pour faire barrage contre les rafales à 75km/h qui sont annoncées sur notre chemin vers Angers…
5 Comments
Neau Valérie
Heureuse de vous avoir réchauffé ne serait-ce le temps d’un repas.
Bonne continuation, un bonheur de vous suivre via ce site.
Marc Frémond
C’était un plaisir de vous avoir à la maison le temps d’une belle soirée de partage en toute simplicité !
Et c’en est un autre de pouvoir vous suivre avec ce super blog!!!
Bonne route et à une prochaine fois 😉😊
Jeanne
Le plaisir était partagé par toute la famille et on espère pouvoir se revoir, sur nos deux roues ou pas, sous une tente ou un toit… 😉😊
MM
Marans ma ville natale !
Bonne route 🙂
Jeanne
Mister Marrant, tu es démasqué ! 😜