Carnet de route

Comment on gère ?

Ou « dis moi comment tu voyages à vélo et je te dirai qui tu es… « 

  • Les repas :

    Nous sommes partis avec un réchaud à gaz, deux casseroles – une grande pour faire chauffer le repas du soir et une petite réservée à l’eau ou au lait du matin – et une petite poêle, pas indispensable mais qui peut simplifier parfois. Généralement, nous pique-niquons le midi et nous mangeons chaud le soir mais on ne fait jamais de grande cuisine même si on aime bien ça dans la vraie vie.

    Nous avons aussi un petit sac isotherme mais qui sert surtout à compartimenter le grand sac de bouffe. Dans les faits, la chaine du froid ne fait pas vraiment partie de nos préoccupations et nos estomacs vont très bien ! De toute façon, nous n’avons jamais eu chaud et nous faisons des courses un jour sur deux, voire tous les jours, pour ne pas avoir trop à porter donc nous avons mangé des yaourts et du fromage sans problème quotidiennement.

    Nous mangeons très peu au restaurant pour plusieurs raisons : c’est plus cher, pas forcément reposant avec les filles et souvent pas sur notre chemin. A part une fois en Suède, nous avons mangé en intérieur uniquement pour être à l’abri. Par contre, on aime beaucoup les pauses « glaciers » mais il n’y a qu’au Danemark que la météo y a été véritablement propice.

    A part Léna qui est farouchement attachée à son lait du matin, nous n’avons aucune habitude de repas, nous mangeons tous de tout et nous aimons beaucoup essayer des spécialités locales, plus ou moins intéressantes : Kouign amman et caramel au beurre salé à St Malo, English breakfast et jelly en Angleterre, Poffertjes et kibbeling aux Pays-Bas, Maultaschen et Schupfnudeln en Allemagne, Fiskfrikadellen et koldskål au Danemark, Knäckebröd et fromage en tube en Suède, foie de morue (bon, ça c’était une idée de Miha mais tout le monde a gouté!) et steak de baleine en Norvège…

    En Scandinavie, la nourriture est chère et on a plus de mal à trouver notre bonheur dans les magasins mais on n’a jamais eu de mal à manger varié sans nous ruiner.
    Quelques exemples de repas qu’on peut trouver partout en Europe et qu’on a beaucoup pratiqués :

– Pour le petit déj : porridge, céréales, brioche, gaufres, pain ou biscottes avec confiture, miel, ghee, beurre de cacahuète …

– Pour le midi : pain, wrap, sachet de céréales cuites… avec concombre, avocat, pastèque, poivrons, maïs, thon, sardines, œufs durs, jambon, mayonnaise, pesto, fromage (souvent insipide et en tranches… du fromage qui ressemble à des lingettes comme dit Alma !)…

– Pour le soir : pâtes fraiches, purée, polenta, gnocchi… avec poisson pané, boulettes, beans, sauce tomate, soupe, champignons ramassés…

  • Les aléas climatiques :

On peut dire assez objectivement que nous n’avons pas eu une chance folle avec la météo mais on ne revient pas avec le sentiment d’avoir été trempés pendant cinq mois pour autant. Déjà, quand on vit toujours dehors, il suffit de deux heures d’éclaircie pour pouvoir dire qu’il n’a pas plu toute la journée et pouvoir pédaler un peu sans kway. Et puis nous sommes plutôt bien équipés pour rouler sous la pluie et la charrette est parfaitement étanche donc les filles sont protégées, ce qui nous laisse la possibilité d’avancer par tous les temps s’il le faut.

Ensuite, on use et abuse des applications de météo qui parviennent à prévoir assez précisément à quel moment on va se faire saucer – sauf en Norvège où la météo n’était juste qu’en temps réel ! Quand on sait qu’il va pleuvoir, on essaie d’organiser la journée en fonction de ça : dormir à un endroit où on peut s’abriter le matin et/ou le soir, ajuster le départ le matin ou l’arrivée le soir, prévoir des longues pauses pique-nique à l’abri, faire les courses pendant l’averse, s’arrêter dans un café pour le gouter… Et quand une journée et une nuit entières de pluie sont prévues, on accélère ou on ralentit le rythme pour pouvoir se rabattre sur une piscine, un musée, une visite et dans le pire des cas, on trouve un logement pour la nuit, ce qui n’est finalement pas si souvent arrivé…

Bien sûr, nous avons souvent plié la tente humide, presque tous les jours à vrai dire à cause de la condensation, et quelques fois carrément mouillée. Bien sûr, elle pue le renfermé et nos tapis de sol sont mouchetés de moisissure mais on n’a jamais été vraiment trempés et désemparés.

Nous avons aussi eu pas mal de vent mais après avoir pédalé en Islande, on relativise tout. D’habitude, si y’a bien un truc qui me fait râler, c’est le vent ! Mais là, on s’est contenté de pédaler plus lentement en attendant qu’il veuille bien changer de sens. De toute façon, nous n’avions jamais d’objectif kilométrique à atteindre. Il ne nous a vraiment embêté qu’une fois en Suède. Nous avons passé une nuit sous la tente avec des bourrasques à 80km/h et là, on ne faisait pas les fiers ! Et comme la météo annonçait encore pire dans les jours à venir, nous avons loué une maison pour protéger la tente et notre capital stress !

Etonnamment, nous n’avons pas beaucoup souffert du froid même s’il a gelé plusieurs fois durant les deux premiers mois. En pédalant, on a rarement eu froid et les filles comme des sardines dans la charrette se sont tenu chaud. Elles ont largement rentabilisé leurs combinaisons en softshell en les portant jusqu’au mois de juillet en Norvège et Léna a utilisé ses boots de ski étanches début aout aux Pays-Bas ! Nous, on a empilé vêtements en mérinos et doudounes en plumes et on s’est faufilé dans nos duvets bien chauds dès la tente montée. Et tout s’est bien passé !

Par contre, question chaleur, nous avons été sacrément épargnés ! Les températures n’ont dépassé les 25° que les derniers jours de notre périple alors nous avons cherché de l’ombre et de l’eau mais sans souffrir vraiment.

  • La fatigue :

    Le secret, pour ne pas avoir à la gérer, c’est de ne pas l’éprouver ! Et on a l’impression d’avoir été moins fatigués pendant ces quelques mois sur les routes que dans la vie normale. La chance qu’on a, c’est qu’on dort tous très facilement n’importe où et n’importe quand, ce qui est déjà une bonne base.

    En pédalant une cinquantaine de kilomètres sans trop de dénivelé – genre pas plus de 500 D+ par jour, on arrive à ne pas ressentir de fatigue physique le soir et à avoir encore plein d’énergie pour jouer au ballon en gonflant les mousses, préparer le repas en montant la tente ou raconter des histoires en changeant une couche.

    Le rythme des filles a évolué au fur et à mesure du voyage et au rythme des saisons. Le froid des débuts les faisait dormir plus, on se couchait plus tôt et elles dormaient les deux dans la charrette, parfois même deux fois dans la journée. En Scandinavie, à la fin du printemps et en été, on se couchait tous autour de 23h pour suivre le soleil et on se réveillait assez tard, bien au calme dans la nature. Quand les jours ont commencé à raccourcir et qu’on a dû fréquenter à nouveau les campings, on s’est couché et levé plus tôt et Alma a arrêté de dormir en journée.

    La plupart du temps, on se couchait avec les filles parce qu’il faisait trop froid ou trop humide pour rester à l’extérieur de la tente – et en plus, ça permet d’éviter le chahut entre les demoiselles qui sont toujours persuadées que la tente est un château gonflable !

    Après quelques jours à la maison, on se rend compte aussi que paradoxalement, on dormait beaucoup plus sereinement sous la tente que dans notre lit. Bien sûr, on a passé quelques nuits pourries sous l’orage ou en pente ou par grand froid ou pour plein d’autres raisons mais la vie au grand air provoque une saine fatigue et s’éloigner de toutes les contraintes de l’autre vie libère incroyablement l’esprit.
  • L’hygiène 

    Très clairement, il faut accepter que tout soit beaucoup moins propre que d’habitude ! Nous, nos mains, nos cheveux, nos habits, notre vaisselle, notre lit… Mais on a essayé de maintenir un niveau acceptable de propreté tout de même.

    En bivouac, on a presque toujours dormi à proximité d’un point d’eau, d’un lac ou de la mer, ce qui nous a permis de nous laver, même succinctement, presque tous les jours. Pour les filles, vues les températures, on a souvent fait du gant-vite-fait ou de la toilette-lingette (des vraies lingettes, pas du fromage en tranches !) et attendu une vraie douche pour les tremper en entier. Pour les cheveux, c’est aussi une autre affaire mais finalement, ils s’habituent assez vite à des lavages de moins en moins fréquents (et ne pas avoir de miroir aide bien à y survivre aussi !)

    Pour les fringues, on a souvent roulé avec des culottes suspendues sur nos rétroviseurs et des pantalons de Léna étendus sur la charrette. Pour le reste, on a fait 2-3 lessives par mois selon les opportunités, on a essayé de ne pas trop se crader (merci les combinaisons et les serviettes de table imperméables et bariolées !) et on a porté des vêtements en mérinos qui ne gardent aucune odeur.

    Pour la vaisselle, la base est souvent faite avec du PQ ou une lingette (toujours pas du fromage et pas la même que pour la toilette, hein!) ou un morceau de pain (sauf en Suède parce que les Wasa, c’est vraiment pas pratique pour essuyer!). On a quand même une petite éponge lavable mais c’est pas forcément plus efficace quand on a peu d’eau et qu’elle est froide. Et d’autant plus sur de la vaisselle en plastique qui garde si bien les gouts et les odeurs… Ensuite, il faut jouer stratégique et ne pas manger le foie de morue dans le même bol que le porridge.

    L’hygiène à vélo, finalement, c’est une question de logistique !