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Tour d'Europe

La petite reine sur le pont du grand roi

 Prague, évidemment, est une ville magnifique… si l’on arrive à faire abstraction des hordes de touristes, ce qui peut s’avérer compliqué… Les jeunes fêtards comme les vieux profs semblent y trouver leur bonheur et on marche difficilement dans les rues du centre tant la foule y est dense. Par chance, le temps n’est pas très clément et même épisodiquement pluvieux, alors les restaurants sont parfois plus occupés que les rues. Par contre, impossible d’échapper au monde dès qu’il s’agit de visiter quelque chose. Tout est payant, y compris les cimetières, les églises et même certaines rues, et pas moyen de ne pas suivre les chemins balisés.

J’ai donc aimé Prague autant que j’en ai détesté la foule..
 
Le premier soir, j’y passe la nuit dans le grand dortoir de l’hôtel Travelers habité par les odeurs de pieds et d’alcool d’un groupe d’argentins, par ailleurs très sympathiques qui, après une heure de discussion en anglais, m’expliquent qu’ils sont en école d’ingénieur à Saint Etienne ! Le barman s’y occupe bien de Frida, et de moi aussi d’ailleurs dont il semble avoir un peu pitié !

Le lendemain, je rencontre Tereza et Daniel qui me cèdent leur canapé pour la nuit. On va au théâtre voir une performance aussi déjantée qu’obscure et je les suis chez des amis qui fêtent agréablement je-ne-sais-quoi. L’ami en question parle français et tient un magasin de location de vélos et j’y passe le lendemain matin à briquer Frida et causer vacances.

 
Et puis je reprends la route parce que les villes me lassent vite. Je suis encore la Moldau pendant quelques kilomètres puis elle se jette dans l’Elbe. Les paysages sont jolis et les cerisiers sont en fleur mais il fait gris, le peu de villes que je croise est sans charme et je peine à trouver où dormir. Et puis le vent souffle et ça ne me plait pas du tout !
 
J’ai l’impression d’être enfermée dans une bulle, coupée du monde par la barrière linguistique et au bout de deux jours, c’est pesant…  Dans les villes, l’anglais est parlé couramment mais ce n’est pas le cas dans les campagnes et il devient usant de toujours redoubler d’ingéniosité pour avoir la réponse à la moindre question…  J’en viens même à me dire qu’il est temps que je sois en Allemagne et j’enchaine donc les kilomètres. 
 
Et puis, au détour d’une ruelle déserte de Litomerice, je croise Martin. Comme aux autres, je lui demande s’il parle anglais, puis allemand. Il s’excuse, il ne parle que tchèque et français ! Martin est un souffleur de verre désœuvré qui a fait ses études à Strasbourg et il est ravi de pouvoir parler français, une aubaine ! On mange ensemble et il me raconte l’occupation soviétique, la révolution de velours, Vaclav Havel, la scission d’avec la Slovaquie, les stigmates du communisme et c’est passionnant. Il m’explique aussi que les tchèques sont slaves et donc assez difficiles d’abord. Et c’est vrai que contrairement à l’Italie, jamais personne ne m’aborde ici. 
 
Je ne suis plus qu’à 50km de la frontière allemande mais je suis désormais réconciliée avec la république tchèque. Même si après ma troisième leçon sur la prononciation, je ne suis toujours pas capable d’aligner deux mots correctement !